L’offre agro-alimentaire est une jungle dans laquelle on peine à se retrouver. Tout le monde en est plus ou moins conscient. Il faut reconnaître que la mondialisation de l’alimentation a rendu les choses pratiquement illisibles pour beaucoup d’entre nous. Avant les années 70, on se contentait de ce que la saison et les productions locales proposaient. Maintenant, on peut à loisir consommer des produits provenant de toutes les parties du globe. Les grandes surfaces sont les vitrines alléchantes d’une industrie productiviste, qui ne s’intéresse pas vraiment à la question éthique. Il faut le dire et le redire encore.
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ToggleL’apparition de labels favorise l’identification des produits bio
Depuis une trentaine d’années, l’agriculture biologique s’est développée à grande vitesse, et l’apparition des labels a favorisé l’identification des produits issus de ces filières.
La nécessité de points de repères s’est fait sentir et les premiers labels sont apparus.
Les cahiers de charges des labels biologiques semblent plutôt vertueux :
- pas de pesticides,
- pas d’OGM,
- minimum 95% d’ingrédients biologiques,
- moins d’additifs…
Très intéressant, pas de doute, car les phytosanitaires sont mauvais pour la biodiversité et pour notre santé.
La nocivité des pesticides est-elle seulement une question de dose ?
Sans doute… Mais le problème va plus loin.
On minimise trop facilement l’effet des phytosanitaires sur la santé avec l’argument d’une dose faible. La réalité, c’est qu’elle est difficilement quantifiable, car cet effet dépend des habitudes alimentaires et du mode de préparation des aliments. Ensuite, il faut penser à l’aspect, plus difficile encore à évaluer pour les toxicologues, que l’on appelle l’« effet cocktail ». En résumé : une substance seule est peu toxique, voire pas toxique à faible dose. Cependant, le cumul de plusieurs substances peut s’avérer bien plus toxique, y compris à faible dose.
Il faut faire entrer dans le bilan :
- les antifongiques,
- les insecticides,
- les désherbants (le fameux glyphosate)…
- les plus de 300 additifs alimentaires,
- la pollution de l’air et de l’eau
- et les éventuels médicaments dont certains d’entre nous ont besoin.
Ces pesticides sont de trop, et nous serions contraints d’en consommer de façon quotidienne, si certains n’avaient pas eu la bonne idée de les dénoncer et de promouvoir une agriculture paysanne, ou du moins plus respectueuse de la planète.
L’avènement de la politique agricole commune a imposé à la France l’alignement de son label « AB » sur le label européen, ouvrant des brèches dans son cahier des charges. On peut donc voir labelliser des produits contenant jusqu’à 5% d’ingrédients non biologiques, dont une cinquantaine d’additifs (contre plus de 300 hors label bio). Ces ouvertures ont été autant d’opportunités pour les industriels dont l’objectif était de récupérer ce marché à tout prix. En effet, le développement de la consommation de produits bio s’est tellement accéléré, que la part était alléchante.
Alors vers quels labels vaut-il mieux se tourner ?
Le label bio européen ne prend pas la bonne direction, loin de là ! Il a déjà mal influencé le label AB français, en lui exigeant d’alléger son cahier des charges, et il s’en est fallu de peu pour que des pesticides ne soient pas autorisés, à partir de 2017.
Plutôt que les labels classiques les plus répandus (AB et Bio européen), il est plus recommandable de se tourner vers des cahiers des charges plus exigeants comme :
- Déméter
- nature et progrès
- bio-cohérence…
Ce sont des indicateurs positifs de plus.
Le label suffit-il à définir un produit de bonne qualité ?
Pas vraiment si l’on observe un peu les étalages de fruits et légumes labellisés. Produire des tomates « bio », garanties sans pesticides, ça peut se faire facilement quand on maîtrise le milieu dans lequel on les cultive. Une serre moderne permet de moduler à volonté la température, la durée des lumières, l’humidité, le contenu de l’air, etc. Alors, il est facile de réduire le nombre de menaces pouvant entraver le développement de la culture. Mais pour autant, ces fruits et légumes, cultivés hors saison, sont-ils « bio-logiques » ? On a peu de raison de le croire.
En effet, la teneur qu’ils peuvent présenter en micronutriments (vitamines, antioxydants… ) est directement dépendante du climat. Le manque de profondeur de la saveur de ces aliments est une preuve tangible de la grande différence du contenu nutritionnel que l’on pourra trouver dans des légumes d’été cultivés en serre en plein hiver… Que ce soit en Espagne ou en Bretagne ! Une autre réflexion s’impose : cultiver en serre pour gagner quelques semaines à la fin de l’hiver ou de l’automne, c’est de bonne guerre. Mais dépenser de l’énergie pour rendre possible la croissance de tomates au mois de décembre n’a plus rien de naturel ou biologique.
Il sera donc parfois plus judicieux de ne pas se précipiter sur tel ou tel aliment parce qu’il est bio. Au contraire, il est mieux d’aller chercher un aliment de saison, non labellisé, mais qui aurait été produit dans une approche paysanne, par une structure proche et de petites dimensions, c’est cohérent. Quid du manque de certitudes concernant la présence de pesticides ? D’autant que même les producteurs labellisés sont suivis de façon assez lointaine sur le long terme.
Comment réduire la présence de pesticides dans nos aliments ?
En effet, que faire pour réduire efficacement la présence de phytosanitaires dans notre alimentation, tout en conservant les micronutriments (donc sans éplucher les fruits et légumes) ?
- Rincer, en brossant, c’est le minimum. Pour aller vite, un peu de savon de Marseille et un rinçage abondant pour ne pas en garder la saveur, c’est pertinent
- La méthode la mieux étudiée, et la plus facile à mettre en œuvre, c’est de faire tremper au moins 15 min, dans de l’eau, avec du bicarbonate, puis rincer et brosser.
- Ensuite, la cuisson à la vapeur est la seule permettant de réduire ultérieurement le contenu toxique. On veillera à ne pas cuire pendant un temps trop long, de façon à garder de belles couleurs et une texture croquante.
Que penser des légumes « garantis sans pesticides » ?
Voilà une autre démarche intéressante, pas parfaite, mais qui séduit nombre de consommateurs. Éviter les pesticides, c’est bien. Garantir leur absence, c’est souhaitable. Mais si c’est pour les enfermer dans des emballages et les transporter sur des centaines de km, quel dommage ! Tout comme le « bio » en emballage plastique, c’est un contresens.
Que penser des aliments ultra-transformés bio ?
A propos des aliments ultra-transformés bio, il faut raison garder. Le biologique n’empêche pas de raffiner, d’extraire, ni de reformuler des aliments mauvais pour la santé. Au contraire, il faut être méfiant face à l’utilisation du label par les marques phares de l’agro-industrie. Et parfois, si ce n’est pas le label, ça peut être simplement un bandeau écrit en vert, une feuille ou un épi joliment sérigraphiés, ou même un nom astucieusement choisi qui vous évoquera la nature et la vie.
En conclusion
On doit donc rester éveillé, comme toujours, et tâcher de discerner par soi-même le produit qui est réellement crédible, et toujours se tourner vers des produits simples ou très peu transformés. Enfin, sans jamais oublier qu’aucun label ne nous enseignera jamais comment équilibrer notre alimentation.